dimanche 21 novembre 2010

Bonne et mauvaise foi

Il y a deux manières de lire et d'étudier le Coran et la Sounna.

La première consiste à y chercher une guidance - c'est-à-dire des exhortations et des exemples qui permettent de savoir quoi croire et faire dans sa vie quotidienne (et au fond, la vie sur terre n'est jamais autre chose que quotidienne : elle est composée d'un jour puis un jour puis un jour, etc.)

La seconde consiste à y chercher des arguments en faveur de ce dont on est déjà fermement convaincu pour des raisons qui n'ont rien à voir avec Dieu, ni avec Son message et Son messager.

Dans ce deuxième cas, on se tourne vers le Coran et la Sounna pour chercher une excuse, une légitimation, une confirmation de ce qu'on veut croire, dire et faire. Si on ne trouve rien, alors on se tourne vers des "savants" accommodants qui ont assaisonné à leur sauce le Coran et la Sounna.

Prenons un exemple concret et précis.

Un(e) musulman(e) est locataire en France.
Il en a assez de payer un loyer - cher - pour son appartement. Il n'a pas assez de cash pour acheter son appartement sans faire d'emprunt. Il est fortement tenté de faire un emprunt pour acheter son appartement. Mais voilà : l'Islam autorise-t-il cela ?

Telle est la question.

Si le musulman suit la première route, qui est celle de la bonne foi, il relit le Coran et la Sounna, comprend (car c'est parfaitement clair) que c'est strictement interdit de faire des emprunts avec intérêt, et se résigne à rester locataire, ou cherche à devenir suffisamment riche pour acheter son appartement cash.

Il n'est peut-être pas ravi, mais il obéit, parce que depuis le début, il cherchait la vérité, et il cherchait à faire ce qui plaît à Dieu, même si ça ne l'enchante pas. Il sait que la vie est un test, et que c'est typiquement dans ce genre de circonstance qu'il est testé. Il veut gagner son test, il suit donc sa raison et sa bonne foi  - qui lui disent que les emprunts sont interdits - plutôt que ses passions - qui lui chuchotent "fais ce que tu veux !"

Mais si le musulman suit la seconde route, qui est celle de la mauvaise foi, autrement dit celle de l'hypocrisie, il relira le Coran et la Sounna en cherchant un signe, même imperceptible, qui va dans son sens. Il ne cherche pas la vérité, il cherche seulement une autorisation de faire des emprunt avec intérêts.

Dépité, il s'aperçoit qu'il n'y a aucun moyen de tirer le Coran et la Sounna dans ce sens, même avec toute la mauvaise foi du monde...

Alors il se tourne vers les savants : y en-a-t-il un qui a autorisé ce que Dieu a interdit ?

Quand il en trouve un (et il finit toujours par en trouver un), il est tout content !

ça y est, il peut faire son emprunt... en s'abritant derrière l'autorité du "savant" qui rend licite ce que Dieu et Son Messager, que la paix et la bénédiction soient sur lui, ont rendu illicite.

Il a gagné...

Croit-il.

Car il a perdu.

Dieu connaît les secrets des coeurs. Dieu sait ceux qui se trompent de bonne foi et ceux qui s'égarent eux-mêmes, parce qu'ils veulent suivre leurs passions.

Au Jour du Jugement Dernier, dire "j'ai suivi l'avis de tel savant !" ne sera d'aucune utilité. Car, dans cette vie, nous avions une tête, le Coran et la Sounna. C'était à nous de bien réfléchir, et de suivre les savants dans ce qu'ils disent de juste, pas dans ce qu'ils disent de faux. C'était à nous d'être de bonne foi. C'était à nous d'être honnêtes avec nous-mêmes, et de faire la part entre ce que désire notre âme, et ce que dit Dieu et Son messager, sur lui la grâce et la paix.

Dans la sourate 14, il y a un verset qui, à mon avis, ne s'applique pas seulement aux mécréants, mais aussi à ce type de personnes qui se disent musulmans, mais qui ne cherchent les avis des savants que pour trouver une légitimation religieuse à leurs propres choix déviants :

Et tous comparaîtront devant Dieu. Puis, les faibles diront à ceux qui s'enflaient d'orgueil : "Nous étions bien vos suiveurs. Pouvez-vous nous être de quelque utilité contre le châtiment de Dieu ?" - Alors, les autres diront : "Si Dieu nous avait guidés nous vous aurions certainement guidées. Il est indifférent pour nous plaindre ou d'endurer; nous n'avons pas d'échappatoire". (14, 21) 

Quand on cherche un "savant" pour légitimer sa mauvaise foi et ses mauvais choix, on est comme ces faibles qui suivent les autres, croyant que parce qu'ils les suivent comme des moutons, ce seront leurs chefs (leur berger) qui prendront la responsabilité de leur faute devant Dieu.

Mais ce verset 21 montre bien que ça ne marche pas comme ça.

Personne ne pourra s'excuser d'avoir fait un mauvais choix et désobéi à Dieu en disant : "Mais, Seigneur, j'ai suivi l'avis de tel savant ! Si j'ai fait un emprunt avec intérêt pour acheter ma maison, je ne l'ai fait que parce que tel Ouléma l'a dit !"

Le Prophète (bénédiction et salut soient sur lui) a dit : « L’obéissance se limite dans le bien ».

Il a dit aussi : « Point d’obéissance à une créature dans la désobéissance au Créateur ».


‘Adiy ibn Hâtem [2] a dit : « je me suis dirigé vers le prophète en portant une croix autour du cou, il me dit alors : ô ‘Adiy ibn Hâtem ! retire cette amulette de ton cou !
Lorsque je suis arrivé devant lui, je l’ai entendu réciter : « Ils ont pris leur moines et leurs rabbins comme divinité en dehors de Dieu ».
Je lui est dit : Ô Messager de Dieu ! Nous ne les prenions pas comme divinité en dehors de Dieu !
Il dit : bien sûr que Si ! Ne vous autorisaient-ils pas ce que Dieu avait interdit, et vous les suiviez dans celas, et vice et versa ?
Je répondis : oui !
Il dit : Et bien, c’est en cela votre adoration !



Tous les musulmans qui préfèrent suivre l'avis d'un savant plutôt que la parole de Dieu et de Son messager sont dans ce cas : ils prennent leurs oulémas comme divinité en dehors de Dieu.

Et quand ils le font, c'est souvent parce qu'ils ont déjà pris leurs passions comme divinités en dehors de Dieu...

C'était un exemple.
L'exemple de l'emprunt avec intérêt.

Prenons maintenant l'exemple de la possession par les djinns.

Ni Dieu, ni Son messager n'ont jamais dit, ni suggéré, ni impliqué, ni insinué qu'elle était possible.

Mais (me direz-vous peut-être) cela ne la rend pas impossible ! Après tout, Dieu ne parle pas non plus des pingouins du pôle Nord, et pourtant les pingouins existent...

Certes, Dieu n'aborde pas tous les sujets.

Mais si l'on peut très bien comprendre qu'Il ne parle pas des pingouins (sujet anecdotique), on comprend déjà beaucoup moins bien qu'Il ne parle pas de la possession par les djinns, sujet très important qui nous concerne tous - si elle existe...  Si la possession par les djinns était une réalité, il aurait été logique que Dieu et Son messager en parle. Ils n'en parlent pas.

Mais il y a plus.

Dieu et Son messager ne parlent pas de la possession par les djinns, et inversement, Dieu et Son messager affirment ce qui est incompatible avec la théorie de la possession par les djinns.

Car Dieu et Son messager insistent sur notre responsabilité.
Nous sommes responsables de nos actes.
Personne d'autre n'est responsable à notre place.

Or si un djinn pouvait nous posséder, nous ne serions pas responsables de nos actes durant le temps que dure cette possession, et les anges ne marqueraient alors ni nos paroles, ni nos actes.

Ni Dieu, ni Son messager n'ont jamais dit : "vous êtes responsable - sauf quand vous êtes possédé par un djinn." Nous sommes toujours responsables (sauf les enfants, les dormeurs et les fous).

Si nous sommes toujours responsables, nous ne sommes jamais possédés, car personne ne peut être tenu pour responsable de ce qui n'est pas à en son pouvoir.

Pour revenir sur cette notion de "possession"...

C'est le fait "d'avoir à soi, de disposer en maître de (quelque chose) et pouvoir en tirer profit et jouissance."

Etre possédé par un djinn, c'est avoir un djinn pour maître.
Il n'y a pas d'autre façon de le comprendre.

Avoir un djinn diabolique pour maître, est-ce compatible avec le fait d'être musulman ?
Je ne crois pas.
Mais comme Dieu est juste, la possession est impossible.
Donc ceux qui prennent un djinn pour maître (il y en a) l'ont suivi : ils ont choisi d'obéir à ce djinn...

 Il est vrai que certains individus d’entre les hommes avaient cherché refuge auprès de quelques individus parmi les djinns. Mais cela ne fit qu’accentuer leur détresse. 

"Chercher refuge" est un acte volontaire.
Il n'y a pas de possession par les djinns, au sens où un djinn qui n'aurait pas été invité ferait soudain un "putsch" et prendrait le pouvoir.
Il y a des gens qui se soumettent volontairement à des djinns, en espérant que ces djinns vont les aider... mais cela ne fait qu'accentuer leur détresse.
Autrement dit, il y a des gens qui se tournent vers le diable et ses alliés pour leur demander de l'aide.
Rien à voir, donc, avec le pseudo-possédé innocent, victime d'un méchant djinn qu'il n'a jamais invité...

Toute "possession" par un djinn est consentie et voulue par le "possédé".
Il n'y a pas de possession par les djinns.
Il y a seulement des soumissions à des djinns.

Les choses sont très claires.

Et les phénomènes que l'on constate chez les soi-disant "possédés" s'expliquent par de tous autres facteurs que la possession, qui est un mythe, une fiction, un hoax, une intox !

Mais encore faut-il être de bonne foi pour le reconnaître...

Encore faut-il chercher la vérité, et pas des justifications à ce que nous dicte nos passions.

C'est le Diable qui nous chuchote : "Tu n'as aucun pouvoir... Ce n'est pas toi qui pense ça, dit ça, fait ça... C'est le djinn qui te contrôle... Je suis le plus fort... Tu n'es qu'une marionnette... Va demander à un exorciste de te libérer du méchant djinn, car toi, tu ne peux rien sur ta propre vie... Remets ton sort entre ses mains, lui seul (l'exorciste) peut te sauver."

Et c'est encore le Diable qui chuchote à l'exorciste : "Cet homme est possédé... Fais sortir le djinn à grands coups... Sert lui la gorge jusqu'à ce que le djinn sorte..."

Et quand le pauvre "possédé" rend l'âme étranglé par l'exorciste, le Diable ricane ! Il a gagné... Il a réussi à éliminer un musulman et à en changer un autre en assassin... tout ça parce que ces musulmans ne réfléchissent pas, tout ça parce qu'ils écoutent leurs passions plutôt que leur raison, tout ça parce qu'ils préfèrent croire à l'irresponsabilité de l'homme (théorie diabolique) plutôt qu'à sa responsabilité (vérité).

1 commentaire:

  1. Ô combien de remarques et de commentaires j'ai sur cet article...

    mais je crois que vais devoir m'arrêter là car il me semble que tu est "possédé (e)" par les maitres du syllogisme...

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