mercredi 8 décembre 2010

L'Hégire intérieur (ou : comment émigrer pour Dieu sans changer d'adresse)

La calendrier islamique commence avec l'émigration des musulmans vers Médine.
Ils ont quitté leur ville natale (La Mecque) pour une autre ville, qu'ils ne connaissaient pas, où ils seraient des étrangers, mais où ils pourraient vivre leur religion, l'Islam.

Nous devons tous émigrer.

Pas forcément physiquement... mais intérieurement, c'est absolument nécessaire.
Car c'est par l'Hégire que les musulmans deviennent pleinement musulmans.
C'est en sacrifiant leurs attachements, leurs habitudes, tout ce qui les relie à leur passé non-islamique, qu'ils deviennent complètement musulmans.

Alors voyons à quoi ressemble un musulman qui n'a pas encore fait son Hégire intérieur, et comparons-le à un(e) musulman(e) qui, lui, l'a fait.

Le musulman qui n'a pas encore émigré dit et pense : "je suis un ARABO-musulman" ou : "je suis un CONVERTI" ou : "Je suis un SALAFI" ou "Je suis un SOUFI" ou "Je suis un NOIR musulman", ou "je suis un SUNNITE" ou "Je suis un BEUR musulman", etc. Au centre de son identité, de son Moi, il met autre chose que l'Islam. Ses ancêtres par exemple. Sa culture familiale. Ou sa race. Ou la secte à laquelle il se sent appartenir. Ou son statut de converti. Bref, d'une manière ou d'une autre, ce qu'il met au centre de sa personnalité, ce à quoi il s'identifie... ce n'est pas l'Islam.

C'est quelque chose qui d'après lui ressemble à l'islam, a un rapport avec l'Islam, est une partie de l'Islam, est la meilleure partie de l'Islam, a permis à l'Islam de... mais à bien y regarder, ce n'est pas l'Islam.

Il se sent arabe... avant tout.
Converti... avant tout.
Salafi... avant tout.
Beur... avant tout.
Etc.

L'Islam ne vient qu'en seconde position. Il croit le contraire, il prétend le contraire, mais son langage et ses actes trahissent ses convictions profondes : il ne se sent pas frère des autres musulmans, il se sent frère des autres converti/salafi/soufi/noir/sunnite/beur/etc. Et, souvent, il déteste cordialement ceux qui ne portent pas la même étiquette que celle qu'il revendique comme sienne.

A ses yeux, son ennemi principal n'est pas le Diable (contre lequel Dieu nous a mis en garde), mais plutôt ceux qui ne sont pas arabes, pas convertis, pas salafis, pas soufis, pas noirs, pas sunnite, pas beurs, etc.

L'Islam n'est pas entré au fond de son coeur. L'Islam est encore à la périphérie de son coeur ; il continue à se défnir par autre chose.

Et maintenant, comparant ce musulman pré-Hégire avec un musulman post-Hégire.

Lui se définit avant tout comme un musulman. Un musulman arabe, noir, converti... mais ce ne sont pas les adjectifs qui comptent. Ceux-ci sont anecdotiques. L'essentiel de son identité, c'est l'Islam. Ce qui signifie qu'il a compris quelque chose d'essentiel : que ce qui le définit, ce n'est pas d'où il vient, mais où il va. Ce n'est pas La Mecque, c'est Médine.

Ce n'est pas sa race ou son pays, c'est ses choix.

Et son choix, c'est l'Islam.

C'est pourquoi il ne se considère pas comme algérien ou français ou chinois avant tout, mais comme musulman avant tout.

Il a dépassé l'esprit clanique, le nationalisme, l'ethnocentrisme. Il a dépassé la mentalité du colonisé et celle du colon. Il a rejoint la vérité et c'est en elle qu'il vit : tous les êtres humains viennent de la poussière. Personne n'est supérieur à personne par ses ancêtres ou la couleur de sa peau. Certains iront au Paradis, d'autres en Enfer. Les meilleurs sont ceux qui purifient leur coeur et se rapprochent de Dieu.

Les meilleurs sont les plus pieux.

Compte tenu de cela, que peut-il tirer d'une étiquette telle que blanc/noir/arabe/français/salafi/soufi/tunisien, etc. ?

Pas grand chose.

Aussi le musulman post-hégire ne leur accorde qu'un intérêt très modéré.

Le musulman pré-hégire est encore englué dans l'esprit clanique, le racisme, le sectarisme et la violence qui en découle ; comme les médinois avant l'Islam, il s'identifie à sa famille, son clan, son pays, sa secte. Et du coup, il déteste - ou du moins se méfie - de tous ceux qui ne sont pas de sa famille, de son clan, de son pays, de sa secte.

Le musulman post-hégire s'est sorti de tout ça. Il a compris que son véritable ennemi, c'est le Diable. Que la seule identité qui vaille la peine qu'on s'y accroche, que la seule qui soit précieuse et profitable, c'est celle de musulman ou de musulmane.

Il n'en ambitionne pas d'autre.

Il ne tire ni fierté ni honte de ses origines. Il ne s'accroche pas à UNE culture sous prétexte que ce serait "la sienne". Il cherche le savoir et la connaissance partout où ils se trouvent - c'est-à-dire un peu partout... C'est un citoyen du monde, même si bien sûr, il garde un attachement sentimental particulier pour la terre qui l'a vu naître. Mais il n'idéalise ni son pays, ni sa famille, ni sa race, ni son sexe. Il a dépensé l'égocentrisme naturel et inné qui est le propre de l'Homme pour accéder au théocentrisme : son identité, son échelle de valeur, son critérium du bien et du mal, c'est Dieu, c'est le Coran, c'est l'Islam.

Que les égyptiens perdent ou gagnent un match de foot ne lui fait ni chaud, ni froid...
même s'il est égyptien.

TOUTES les injustices le dérangent, et pas seulement celles qui touchent son pays/sa famille/sa race/son sexe.

Il est un serviteur de Dieu ; elle est une servante de Dieu.

Et comme identité, ça lui suffit.

Tel est le musulman ou la musulmane POST-hégire.

1 commentaire:

  1. cet individu dans ces caractéristiques libre des origine de son appartenance culturelle ...me ressemble assez ...mis a part le que je suis athée.

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